Le syndrome de la bonne élève : quand la performance prend le pas sur le plaisir

Dans ce nouvel épisode de Safe Place, Océane (alias @oceandreaa sur Instagram) et son amie Charlotte (alias @Charlottemartn), toutes les deux créatrices de contenu et runneuses reviennent sur un sujet qui parlera à beaucoup : le syndrome de la bonne élève.

Cette envie irrépressible de tout comprendre, tout contrôler, tout optimiser, jusqu’à parfois oublier pourquoi on fait les choses. Pour en parler, elles ont invité Amandine Fouquenet, cycliste professionnelle, afin de confronter le regard d’amatrices passionnées à celui d’une athlète dont la performance est un métier. Spoiler : même au plus haut niveau, savoir lâcher prise reste un art.

Quand le besoin de bien faire devient un mode de vie

Le terme de syndrome de la bonne élève désigne cette tendance à vouloir exceller dans tout ce que l’on entreprend. Charlotte le résume ainsi : « À l’école, c’est celle ou celui qui cherche à tout comprendre pour obtenir les meilleures notes. »
Mais ce réflexe d’hypercontrôle, souvent valorisé dans l’enfance, dépasse rapidement le cadre scolaire. Il s’installe dans la vie professionnelle, personnelle… et sportive.

Dans le monde de la course à pied, cela se traduit par une volonté de tout maîtriser : comprendre la science de l’entraînement, optimiser la récupération, surveiller chaque donnée physiologique. Les coureurs et coureuses se transforment alors en véritables gestionnaires de leur propre performance.

Ce comportement, souvent motivé par la peur de mal faire ou par le besoin de validation, peut pourtant éloigner du plaisir initial. Comme le souligne Charlotte : « C’est une manière de se rassurer, parce que la forme ne se contrôle pas comme un examen. »

De l’école au sport : une continuité presque naturelle

Pour Océane, ce rapport à la performance trouve ses racines dans l’enfance : « Je voulais tout faire parfaitement. J’apprenais chaque leçon par cœur, je ne supportais pas l’idée d’être prise au dépourvu. »
Ce besoin de tout contrôler s’est ensuite transposé dans le sport. Les montres connectées, applications d’analyse et autres outils de suivi sont devenus de nouveaux bulletins de notes.

Aujourd’hui, plus de 90 % des coureurs réguliers possèdent une montre GPS. Une statistique révélatrice d’un rapport presque scolaire à la pratique sportive : on mesure, on compare, on évalue. Mais à force de vouloir progresser, certains finissent par transformer une activité de plaisir en une source de tension permanente.

L’amateur professionnel : la frontière floue

Charlotte évoque un concept parallèle : celui de « l’amateur professionnel ».
Il s’agit de sportifs amateurs qui, par souci d’optimisation, adoptent les habitudes d’un athlète élite : analyse de la fréquence cardiaque, contrôle du sommeil, planification nutritionnelle, suivi de la charge d’entraînement. « Le problème, explique-t-elle, c’est que ces personnes vivent avec les contraintes d’un professionnel, sans en avoir les conditions. Elles travaillent, ont une vie de famille… mais s’imposent les mêmes exigences. »

Cette quête de perfection s’accompagne souvent d’une charge mentale importante, voire d’une forme de culpabilité dès que tout n’est pas « optimal ». Comme le rappelle Océane : « Le repos fait partie de l’entraînement. Mais quand on veut être parfait, on finit parfois par l’oublier. »

Le regard d’une professionnelle : apprendre à se détacher des chiffres

Pour replacer la question dans un autre cadre, Charlotte et Océane ont échangé avec Amandine Fouquenet, cycliste professionnelle depuis six ans au sein de l’équipe Arkéa-B&B Hotels.
Championne de France de cyclo-cross, elle connaît bien la rigueur et les contraintes du haut niveau : « Mes journées se ressemblent : entraînement le matin, récupération l’après-midi, et beaucoup d’attention portée à la récupération et à la nutrition. C’est un vrai rythme de travail. »

Dans son quotidien, chaque séance est calibrée : watts, fréquence cardiaque, puissance développée, zones d’effort. Mais même à ce niveau, Amandine a appris à se méfier des excès de contrôle.

« J’utilisais une montre qui indique ton niveau de récupération. Avant une course, si je voyais que j’étais dans le “jaune”, ça pouvait me miner le moral. J’ai dû apprendre à m’en détacher, car parfois les chiffres ne reflètent pas la réalité. »

Avec l’expérience, elle a compris que la performance ne se résume pas à une somme de données. « Les chiffres, c’est utile, mais il faut aussi savoir s’écouter. Quand tout est bien fait et que le résultat n’est pas au rendez-vous, c’est souvent là qu’on réalise l’importance du mental. »

Redonner du sens à la pratique

À travers ces échanges, un constat s’impose : qu’on soit amateur passionné ou athlète de haut niveau, le risque est le même — perdre de vue le sens premier de la pratique.

Amandine résume avec lucidité : « Le plus beau, c’est parfois la préparation elle-même, pas forcément le résultat. »
Et Charlotte conclut : « Nous avons la chance de pratiquer un sport pour le plaisir. Ce serait dommage d’y ajouter une pression qui n’a pas lieu d’être. »

Le syndrome de la bonne élève, c’est finalement cette envie sincère de bien faire… poussée un peu trop loin. L’équilibre se trouve peut-être là : apprendre à courir sérieusement, sans se prendre trop au sérieux.


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