Coupure sportive : faut-il savoir lever le pied ?

Et si, pour progresser, la meilleure séance d’entraînement était celle que vous ne faites pas ?

Dans cet épisode, on reçoit Stéphane Diagana, ancien athlète de haut niveau, pour aborder un sujet encore mal compris par de nombreux coureurs : le repos.

Pas le repos subi. Pas la blessure qui vous immobilise.

Mais le repos pensé, organisé, assumé. Celui qui fait pleinement partie de l’entraînement.

Spoiler : non, lever le pied ne signifie pas perdre son niveau, et oui, parfois, s’arrêter permet d’aller plus loin.

Le repos, cet entraînement invisible

Dans l’imaginaire collectif du coureur, progresser rime souvent avec enchaîner les séances. Pourtant, comme le rappelle Stéphane Diagana, l’entraînement ne se limite pas au moment où l’on court.

« La récupération, le repos (quelle que soit la forme que peut prendre la récupération), ça fait partie de l’entraînement. »

Pourquoi ?

Parce que l’entraînement n’est qu’un stimulus. On sollicite le corps, on le met sous contrainte puis on attend. C’est pendant cette phase, en dehors des séances, que l’organisme s’adapte, se réorganise et progresse.

Sans récupération, pas d’adaptation. Et sans adaptation, pas de progrès.

Courir tous les jours : bonne ou mauvaise idée ?

La question revient souvent, surtout chez les coureurs très investis : Peut-on courir tous les jours sans danger ?

La réponse de Stéphane Diagana est nuancée et donc intéressante.

Oui, courir tous les jours peut être envisageable :

  • si l’intensité est maîtrisée,

  • si les stratégies de récupération sont adaptées,

  • et si cela s’inscrit sur une période limitée.

Le problème, c’est le contexte.
Ce qui est possible pour un athlète professionnel, entouré et disponible à 100 %, devient beaucoup plus risqué pour un amateur jonglant avec le travail, la famille et un sommeil parfois écourté.

« À un moment, on arrive à une impossibilité de récupérer. On arrive au surentraînement, à la contre-performance, puis à la blessure. »

Autrement dit : courir tous les jours pendant quelques mois, pourquoi pas.
Pendant dix ans, sans filet de sécurité ? Beaucoup moins.

Repos hebdomadaire VS vraie coupure : deux logiques différentes

Stéphane Diagana distingue clairement deux formes de repos.

  • Le repos “court”
    Une journée off dans la semaine, ou tous les 10 à 15 jours.
    Objectif : assimiler la charge, éviter l’accumulation de fatigue, rester disponible pour la suite du plan.

  • La coupure annuelle
    Souvent placée après un objectif majeur ou pendant les vacances. Ici, on parle d’une pause plus longue, parfois de plusieurs semaines.

Mais attention : coupure ne signifie pas immobilité totale.

Couper l’entraînement (sans arrêter de bouger)

Bonne nouvelle pour les coureurs qui ont du mal à rester immobiles : lever le pied ne veut pas dire ne plus rien faire.

« On peut couper l’entraînement très cadré, mais garder de l’activité physique, ce n’est pas interdit. »

Marche, vélo, randonnée, sports portés, escalade…
Changer d’activité permet :

  • de s’aérer mentalement,

  • de maintenir une base physique minimale,

  • de faciliter la reprise,

  • et de réduire le risque de blessure grâce à la variété des sollicitations.

La diversité agit comme un antidote à la monotonie de l’entraînement.

Et le désentraînement dans tout ça ?

C’est la grande peur du coureur : perdre son niveau. Ne jamais revenir. Repartir de zéro.

Soyons clairs : oui, une coupure entraîne une baisse des capacités.
Aérobie, musculaire, endurance, puissance… tout diminue. C’est normal.

Mais cette perte est transitoire.

« Vous allez perdre le niveau fonctionnel, mais pas la capacité à le retrouver. »

Pourquoi ? Grâce à ce que la science appelle le marquage épigénétique.

L’épigénétique : la mémoire cachée de l’entraînement

Sans entrer dans un cours de biologie, l’idée est simple :
l’entraînement laisse une empreinte durable dans l’organisme.

Même après une pause, ce marquage permet au corps de :

  • relancer plus vite les mécanismes énergétiques,

  • produire plus facilement les protéines clés de la performance,

  • retrouver un niveau antérieur bien plus rapidement qu’un débutant.

En clair : le moteur peut être un peu encrassé après la coupure, mais le mode d’emploi est toujours là.

En résumé : lever le pied pour mieux repartir !

La coupure sportive n’est ni une faiblesse, ni une régression.
C’est un outil, au même titre qu’une séance de fractionné ou une sortie longue.

À condition de :

  • l’anticiper,

  • l’assumer mentalement,

  • adapter intelligemment la reprise.

Parfois, pour aller plus vite, plus longtemps, plus sereinement, il faut simplement accepter de s’arrêter un peu.

Ce n’est pas fuir l’entraînement, c’est le comprendre.


Suivant
Suivant

5 signes que tu n’exploites pas ton vrai potentiel de vitesse (et comment le débloquer)