Aurélien Sanchez : ce que m’a appris la course la plus dure du monde

"La Barkley, c'est un puzzle géant avec 1 % de réussite. C'est ça qui m’a attiré." — Aurélien Sanchez

Qui n’a jamais entendu parler de la Barkley ? Course mythique et presque impossible, elle fascine bien au-delà du monde du trail. Et il y a deux ans, un Français a réussi l’exploit : Aurélien Sanchez. Nous avons tendu le micro à ce coureur pas tout à fait comme les autres, pour qu’il nous raconte son incroyable aventure — et ce que cette course lui a appris.

Crédit : Aurélien Sanchez finisher de la Barkley Marathon 2025

De la campagne au Grand Canyon

Aurélien a grandi dans un petit village de 900 habitants près de Carcassonne. À l’époque, il ne rêvait pas de dénivelé ni de kilomètres, mais de ballon rond : "J’étais passionné de foot. Je vivais pour ça."

Le déclic viendra des années plus tard, en Arizona, où il déménage pour le travail : "Je me suis mis à randonner dans les parcs nationaux. Petit à petit, j’ai commencé à trottiner, puis à augmenter les distances. C’était grisant." De la randonnée au trail, le pas est vite franchi.

Une culture de l’aventure

Dans les clubs américains, Aurélien découvre une approche du trail un peu différente de celle qu’il connaîtra plus tard en Europe : "Là-bas, beaucoup cherchent l’aventure plus que la performance. C’est une communauté d’aventuriers."

Cela tombe bien : Aurélien ne se définit pas comme un coureur pur jus. "Je viens de la rando. Je me considère plus comme un ultra-aventurier que comme un ultra-trailer. Je marche plus que je ne cours."

Cette philosophie le mènera tout naturellement vers des défis hors norme, avec une obsession : repousser ses limites.

La Barkley : une énigme plus qu’une course

Premier contact avec la Barkley ? Un reportage de Stade 2 en 2014. "Je me disais : mais pourquoi ils font ça ? Souffrir pour ne pas finir… je ne comprenais pas." Et pourtant, quelques années plus tard, après une randonnée "impossible" au Grand Canyon, l’envie germe : "Je voulais sortir de ma zone de confort. Je voulais viser loin."

La Barkley coche toutes les cases : 100 miles (officiellement…), 20 000 mètres de D+, 60 heures pour finir, orientation à la carte et boussole, pas de GPS, pas de ravitaillement, et un taux de réussite d’à peine 1 %. "C’est un puzzle géant. C’est ça qui m’a captivé."

Crédit : Outside.fr - Aurélien Sanchez finisher de la Barkley Marathon 2025

Une sélection… ésotérique

Contrairement à une course classique, on ne s’inscrit pas à la Barkley. On y est invité. Il faut d’abord résoudre l’énigme de l’inscription, puis convaincre avec une lettre de motivation. "Pendant six ans, j’ai postulé. J’ai fait des défis pour être légitime, comme le record du John Muir Trail."

Le jour où le fameux mail de "condoléances" est arrivé, Aurélien n’y croyait plus : "J’ai pleuré. Pour moi, c’était déjà une victoire d’être au départ."

Trois mois pour préparer l’impossible

"J’avais un fichier Excel avec tout : orientation, matos, nutrition, stratégie de sommeil…"

En trois mois, Aurélien se prépare avec une rigueur quasi scientifique. Le point le plus délicat ? "L’orientation. On se perd souvent. Minimiser les erreurs est clé." Comme beaucoup de finishers, il passe des heures à étudier la carte, à repérer les moindres détails du parcours : "On fait ses devoirs. C’est indispensable."

Une expérience collective

Malgré l’image d’une course ultra-sélective, l’esprit de la Barkley est tourné vers le partage : "C’est une course contre la course. On veut au moins un finisher chaque année. Il y a beaucoup de coopération."

Mais attention : "Chacun doit être autonome. Suivre un leader sans rien apprendre, ce n’est pas l’esprit."

Crédit : Jogging International

Le jour J : une concentration maximale

"Je vivais mon rêve. Mais je suis resté concentré jusqu’à la dernière seconde."

Aurélien se souvient de chaque instant de sa course : l’attente du départ, les boucles passées à observer chaque arbre, chaque rocher. Une vigilance constante, renforcée par l’histoire tragique de Gary Robbins, recalé pour six secondes après s’être trompé au dernier virage. Tant que je n’étais pas à 200 mètres de l’arche, je ne me relâchais pas."

Finalement, il franchira la ligne avec 1h30 de marge. "C’était un mélange d’émotions. J’ai accompli mon rêve."

Et après ?

De retour en France, Aurélien découvre la notoriété : "C’était grisant. Mais ce n’est pas mon métier. J’ai vite eu besoin de revenir à ma vie normale." Pas de blues, mais une envie de continuer à explorer ses limites : "Je prépare le Tor des Géants. Ce sont les défis longs qui m’animent le plus."

Le conseil d’Aurélien

"Soyez patients, soyez résilients. Faites partie de la communauté. Vivez des aventures. Et un jour, le tour viendra." Et si vous voulez plonger encore plus dans son aventure, vous pouvez lire son livre : La Résolution. Comment j’ai fini la Barkley.



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