Cétogène, Low-Carb: Décryptage des Régimes Controversés

Dans cet épisode, nous explorons le monde des régimes controversés dans le monde du sport avec l'expertise de Laurie-Anne Marquet, nutritionniste sportive. Laurie-Anne nous aide à comprendre les bases scientifiques de ces régimes, en examinant leurs impacts potentiels sur la performance et la santé. Elle déconstruit pour nous les mythes et présente les faits ! 

Le régime cétogène : qu’est-ce que c’est ?

Le régime cétogène est basé sur une grande consommation de lipides. On est autour de 80% de l’apport global contre environ 30 à 35% pour les recommandations classiques. A contrario, la part de glucides est fortement réduite. On parle de moins de 50 grammes par jour. Cela conduit à la production de corps cétogènes. Ce sont des composés non glucidiques capable de passer la barrière encéphalique pour aller fournir en énergie le cerveau, qui normalement se nourrit de glucose. On retrouve ces situations lors des jeûnes prolongés par exemple.

Le régime cétogène doit être différencié du low CHO- High Fat, moins extrême avec 60-70% de lipides.

Concrètement, on va consommer des aliments non transformés riches en lipides : de la viande, du poisson, des oeufs, des graines, des huiles, des avocat, de la coco, des olives, des produits laitiers…

Quels sont les avantages et les inconvénients du régime cétogène ?

Comme tout régime, le régime cétogène comporte un certain nombre d’avantages, mais aussi des inconvénients non négligeables.

  • Les avantages

Tout d’abord, les régimes high-fat ont été étudiés suite à la découverte des réserves en glycogène, leur rôle dans la fatigue et le fait que ces réserves soient très limitées. Les chercheurs se sont posés la question : comment épargner les réserves en glycogène pour repousser la fatigue ? Comme le muscle est capable d’oxyder les glucides et les graisses, une théorie était d’augmenter la disponibilité et la capacité d’oxyder les lipides.

De plus, il était observé aussi que les athlètes consommaient trop de glucides, avec des pics d’insuline répétés. L’utilisation de produits a conduit certains scientifiques à tirer la sonnette d’alarme en estimant que cela pouvait avoir des effets néfastes sur la santé.

Cependant, aujourd’hui, on peut affirmer que le régime cétogène n’a pas d’effet bénéfique sur la performance. Certes on observe un augmentation du taux d’oxydation lipidique à l’effort mais ce n’est pas associé à une amélioration de la performance.

Concernant maintenant la perte de poids, souvent invoquée pour mettre en avant le régime cétogène, elle a bien été observée sur des populations obèses.  Il y a 2 mécanismes qui sont évoqués pour expliquer l’effet de ce régime dans la perte de poids : 

  1. L’augmentation de la sensation de satiété qui conduit à consommer moins de calories. En général, il peut y avoir plus de protéines dans les repas, ce qui augmente la satiété ou encore moins de rebond d’hypoglycémie.

  2. Un avantage métabolique car il a été observé que même sans déficit calorique, les participants perdaient du poids. Cet avantage métabolique serait dû à l’augmentation de la thermogenèse alimentaire du fait de la consommation de protéines, un plus grand turnover protéique pour fournir la gluconéogenèse et une plus grande perte d’énergie liée à la perte de cétones dans la sueur ou les urines.

  • Les Inconvénients

Il a été montré que les régimes high-fat pouvait conduire à de l’hypertriglycéridémie (accumulation de triglycérides), facteur de développement d’athérosclérose, notamment chez des personnes sédentaires.  De plus, le régime high-fat est un régime basé sur les graisses animales, sources d’oméga 6, qui peuvent avoir un impact sur des dysfonctions des cellules endothéliales (qui tapissent les vaisseaux sanguins) dont l’athérosclérose du fait de l’effet pro-inflammatoire que présentent ces graisses.

D’autres études montrent également un effet sur l’humeur avec des états d’anxiété, de dépression, de peur, d’irritabilité plus prononcée dans le cas de régime high-fat.

Mais au-delà de l’aspect purement santé, se couper totalement des glucides impliquent de gros changements dans nos choix alimentaires : plus de pizza, pâtes, pain, riz… La vie sociale peut se trouver fortement impactée par ces choix. Il est fortement déconseillé de se lancer dans ce régime si l’on n’est pas intimement convaincu de ses bénéfices et que l’on est pas prêt à faire tous les sacrifices.

Low-carb, Sleep-low, Train-low : en quoi consistent ces régimes ?

Les approches low-car, sleep-low ou encore train-low sont moins extrêmes dans leurs approches que le régime cétogène. Elles ne réduisent pas l’apport en glucides. Simplement, la temporalité d’apport en glucides est différente

Elles ont toutes l’objectif d’optimiser le métabolisme énergétique et d’économiser les réserves en glycogène musculaire.

  • La stratégie train-low consiste à ne pas apporter de glucides pendant les entraînements. C’est l’exemple de l’entrainement à jeun. Lors de ces entrainements, les études ont démontré une plus grande oxydation lipidique.

  •  La stratégie sleep-low consiste à dormir avec de faibles réserves en glycogène. Il s’agit de réaliser un effort à haute-intensité le soir pour vider les réserves en glycogène musculaire, suivi d’un dîner sans glucides, une nuit jeûnée et un effort à jeun réalisé le lendemain matin. L’apport en glucide de la journée a lieu sur une fenêtre réduite entre le matin et le début de la séance à haute intensité le soir.

    Les principales adaptations observées suite à la mise en place de ces stratégies sont une plus grande densité mitochondriale et une plus grande capacité d’oxydation lipidique.

Cétogène, Low-Carb… Quels effets sur la performance ?

Il y a une grosse divergence entre les chercheurs sur la question de l’impact de ces régimes sur la performance.

Aujourd’hui si on prend des études scientifiques sérieuses sur la performance avec des protocoles de recherche adaptés, on peut affirmer que les régimes cétogène ou low-carb n’ont pas d’effet bénéfique sur la performance, que ce soit sur une adaptation à court-terme ou à long-terme.

Il a été montré que les régimes riches en graisses augmentent l’oxydation lipidique, diminuent le quotient respiratoire à l’effort. Or aucun bénéfice sur la performance n’a été montré, remettant en cause l’hypothèse qui était d’épargner les réserves en glycogène.

Finalement, on s’est rendu compte que le métabolisme lipidique était favorisé au détriment du métabolisme glucidique : les réserves en glycogène musculaire sont diminuées (et non épargnées), on observe une moins bonne glycogénolyse (l’utilisation du glycogène musculaire) du fait de la diminution de l’activité d’une enzyme impliquée dans le métabolisme glucidique, la pyruvate dehydrogenase. 

Or la performance est conditionnée par la capacité à produire des efforts à haute-intensité. On a donc besoin de produire de l’énergie à haut débit de façon la plus économique possible. Il s’avère que les glucides demandent moins d’oxygène pour être oxydés que les lipides.

Enfin, il a été montré que les régimes riches en lipides réduisait la flexibilité métabolique, c’est-à-dire la capacité à switcher de l’un à l’autre des substrats. À l’inverse, la stratégie sleep-low a montré une amélioration de la performance après 3 semaines d’entraînement via cette stratégie. On observe une réduction du poids, une augmentation des marqueurs du métabolisme énergétique, une réduction de la perception de l’effort.

CONCLUSION

Ne choississez pas de vous passer des glucides ! Ce sont eux qui font la performance. Il faut chercher à optimiser le métabolisme énergétique, à renforcer la flexibilité métabolique. Mais pour ce faire, employez plutôt des stratégies train-low ou sleep-low qui périodisent l’apport glucidique mais ne le réduisent pas.

Ne soyez pas “statique” dans votre approche de la nutrition avec des journées types : lorsque l’entraînement est peu intense, vous pouvez réduire l’apport glucidique pour orienter votre métabolisme vers l’oxydation lipidique. Mais lorsque vous mettez des intensités ou que les courses approchent augmentez votre apport glucidique qui vous permettra de mettre l’intensité voulue dans vos entraînements.

Jouez avec cette périodisation glucidique à l’échelle de vos entraînements hebdomadaires voire macrocycles sur une saison. elles seront aussi bcp plus faciles à mettre en place dans votre vie de tous les jours.


Cétogène, low-carb… décryptage de ces régimes controversés

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