Courir libre : comment combattre le harcèlement de rue ?

A l’occasion de la Orange Night Run une course de nuit organisée le 17 Juin dernier à Paris, nous avons décidé de nous intéresser à un sujet sensible, parfois tabou, mais crucial - le harcèlement de rue. Comment combattre ce fléau ? Quels sont les moyens mis en place pour aider les femmes à pratiquer leur sport ? C’est ce que nous allons voir dans cet épisode.

Harcèlement de rue : ce fléau

Imaginez un instant. Un soir d'été, vous chaussez vos baskets, vous enfilez votre tenue de course, prête à explorer les rues de votre ville, à sentir l'air frais sur votre visage, à retrouver cette sensation de liberté que vous aimez tant.

Seulement, ce qui devait être un moment de plaisir et de bien-être se transforme vite en cauchemar. Des commentaires déplacés, des regards insistants, du sifflement, voire des comportements bien plus inquiétants.

Selon une étude réalisée par le magazine “Runners”, une femme sur deux a déjà été harcelée pendant un entrainement de course à pied et  30% d’entre elles ont été suivies pendant un jogging. Ces chiffres font froid dans le dos. Pourtant, la définition-même du harcèlement de rue pose encore aujourd’hui quelques questions.

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L'expression "harcèlement de rue" a été théorisée pour la première fois par l'anthropologue américaine Micaela di Leonardo en 1981. Elle décrit le phénomène comme l'approche d'une ou plusieurs femmes par un ou plusieurs inconnus dans un espace public, autre que leur lieu de travail. Par le regard, les mots ou les gestes, l'homme affirme son droit à forcer l'attention de la femme, la réduisant à un objet sexuel et lui imposant une interaction.

La loi de juillet 2018 introduit le concept d'outrage sexiste, décrit comme des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste dégradants, humiliants, intimidants, hostiles ou offensants. Contrairement au harcèlement, l'outrage sexiste n'exige pas la répétition et peut être sanctionné dès le premier acte. Depuis 2023, l'outrage sexiste ou sexuel aggravé est un délit.

En pratique, on identifie trois types de harcèlement de rue les plus courants : les attouchements physiques, le harcèlement verbal et la confrontation à un individu se masturbant.

Faire face au harcèlement de rue à son échelle

Le harcèlement de rue concerne majoritairement des femmes. Face à ce risque auquel 2 femmes sur 3 seront confrontées durant ses entrainements de course à pied, elles ont mis en place quelques stratégies.

Certaines renoncent à leur sortie, d’autres sortent en groupe, d’autres encore, très nombreuses, adoptent leur tenue vestimentaire pour ne pas “tenter” les éventuels hommes sur leur parcours. Les moyens de géolocalisation sont devenus des indispensables et certaines n’hésitent plus à sortir armées. L’obligation de recourir à tant de méthodes fait peser sur les concernées une grosse charge mentale et révèle un sentiment d’insécurité indéniable.

Quand malgré tout, le harcèlement se produit, il existe quelques gestes qui peuvent se révéler utiles. Tout d’abord, si vous êtes témoins, vous pouvez : alerter, faire du bruit, relever le comportement ou tout simplement vous rapprocher de la victime pour qu’elle se sente soutenue.

Si vous êtes victime, sachez que vous avez la possibilité de porter plainte. Dans l’immédiat, vous pouvez solliciter l’aide de passants, contacter un proche en ayant préenregistré des numéros d’urgence… Rien ne vous oblige à répondre et à entrer en opposition directe avec votre harceleur si vous craignez pour votre sécurité. Il y a autant de réactions que d’individus et toutes sont valables. C’est d’ailleurs ce que souligne l’une de nos invités, Mathilde Castres, présidente de l’association Sine Qua Non.

Harcèlement de rue : quand les pouvoirs publics s’engagent

Le harcèlement de rue n’est pas seulement un “problème de femmes”, c’est un sujet sociétal incontournable. À ce titre, les pouvoirs publics se doivent aujourd’hui de prendre la mesure du problème et de tenter de proposer des solutions pour le combattre.

La Ville de Paris, par exemple, s’emploie à créer des parcours sécurisés, éclairés et balisés pour inciter les femmes à courir tout en se sentant plus en sécurité. Les quais de Seine, les bois, les parcs etc… Font l’objet d’une attention toute particulière. Les forces de l’ordre sont aussi déployées plus largement sur les zones les plus à risque. Leur présence doit servir de dissuasion en attendant de parvenir à s’attaquer au coeur du problème.

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On a pu voir apparaitre des initiatives à visée plus préventive. On pense notamment à la distribution de flyers qui a fait grands bruits dans les milieux féministes. Certains dénoncent une mascarade, une action largement insuffisante là où d’autres saluent l’initiative et considèrent que les conseils aux témoins prodigués sur ces brochures peuvent se révéler utiles. Quoi qu’il en soit, le constat est là : le harcèlement de rue est devenu un sujet d’actualité qui provoque de vives émotions et de nombreux débats.

Nous avons reçu Pierre Rabadan, adjoint à la Mairie de Paris en charge du sport, des Jeux Olympiques, Paralympiques et de la Seine pour évoquer toutes les actions mises en place et à venir.

Prévention et sensibilisation pour combattre le harcèlement de rue

Mais les pouvoirs publics sont loin d’être les seuls à s’emparer du problème. Certaines associations ont fait de la reconquête de l’espace public par les femmes leur cheval de bataille.

L’association Sine Qua Non , organise par exemple des squads, des sorties en ville à la nuit tombée, qui regroupent des coureuses et des coureurs. Sensibiliser, discuter, débattre même, ce sont toutes ces actions qui permettent aujourd’hui à cette association de participer à l’évolution des mentalités.

Que ce soit à l’échelle de l’État ou par des initiatives personnels, le harcèlement de rue doit devenir une préoccupation de premier plan. L’objectif ? Permettre aux femmes de courir libres, sans crainte d’être harcelées.


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